Sur la toile
Bénédicte de Dinechin approfondit son travail sur une
valeur ou sur une dominante colorée. Si certains pigments lui
sont plus naturels comme les bleus et les verts, elle s'est
récemment attaquée aux rouges vermillon ou Magenta, aux
jaunes de cadmium et aux orangés.
Du magma informe de la couleur, Dinechin fait surgir des formes qui
deviennent singulières, nerveuses et tendues. Elle donne du
rythme à son oeuvre, c'est le geste même du peintre qui
devient oeuvre d'art; le mouvement pose un acte sur la toile.
Par le morcellement et la fragmentation de l'image, la peinture de
Bénédicte de Dinechin trouve, pour se libérer de la
dictature du signe, l'équilibre entre valeurs et couleurs,
structures et formes, cernes et aplats.
Elle nous propose cette saison-ci une oeuvre moins portée sur la
dynamique du geste, une oeuvre pacifiée qui nous invite à
la méditation partagée.
Corinne Magne, historienne de l'art, Juin 2008
Démarche
La peinture n’est ni reproduction, ni
représentation. Elle est une manière de communiquer. C’est
vrai, comme on me l’a souvent fait remarquer, que je donne le
primat à la couleur, probablement parce qu’elle touche plus
directement au cœur par les sens qu’elle éveille. Puis, je
laisse advenir les formes et les signes par lesquels l’être
tout entier s’exprime dans la dynamique du geste ; ils
viennent du plus profond de moi-même, à condition qu’existe
cette mystérieuse alchimie entre un total lâcher-prise et une nécessaire
réflexion qui permet de faire naître sur la toile un instant
de vérité dans son incroyable matérialité. Parce que la
matérialité a son importance. Paradoxalement, les excès de
matière, les empâtements, les gaufrages, tout comme les
transparences et les espaces vides, tout concourt à mettre à
jour ce qui m’est au départ caché, à révéler un instant du
monde, un morceau d’univers, à dire ce qu’il y a au-delà des
apparences, comme une évidence. Quand l’alchimie opère,
l’autre, celui qui regarde, est saisi ; Et par-delà la
matérialité de l’œuvre, ou plutôt grâce à elle, entre en
communion. C’est ce but, je crois, que je poursuis avec mon
pinceau et mes pigments : par la matière désépaissir le monde
et dans le même mouvement le donner à voir. Ou quelque chose
comme çà.
Bénédicte de Dinechin